Demis Roussos en fut un, un grand modèle avec poils, canine, tunique et manteau sur les plateaux de télévision, ouvert au mysticisme, à la paresse, à l'argent et aux festins. Durant les années 70 et 80, on le voyait aussi souvent qu'Yvan Rebroff, autre barbu colossal d'un autre folklore musical, plutôt russe.
Demis
Roussos est mort le 26 janvier, au moment où une certaine gauche
radicale prenait le pouvoir en Grèce. Quel est le rapport ? Son
radicalisme n'a pas dépassé 666, l'album
conceptuel d'Aphrodite's Child d'après l'Apocalypse
de St Jean (!),
sorti en 72, où on entend plus sa basse que sa voix surpuissante aux
aigus si gracieusement fêlés. Ensuite, il a débordé le
psychédélisme, sa fourrure et sa voix pour faire une carrière de
poids dans la variété internationale. A part les poils, on se
demandait si c'était le même homme que sur la pochette d'It's
five o'clock.Car
il faut se souvenir qu'Aphrodite's Child a incarné le rêve hippie,
entre 68 et 70. Pas dans les journaux spécialisés : dans les
booms, le living des parents, les noms gravés au compas sur les
tables, les embrassades sur le chemin du collège. Avec presque pas
de guitares, un orgue, une basse et cette voix. Un vaisseau
vertical... Les jeunes de 2015 savent-ils ce qu'est un slow ? Le
genre qui fait fondre toute timidité. Se lever tremblant d'amour
pour on ne sait qui à la première note. Ce genre d'ascension... Une
certaine idée de son prochain et de son lointain.
Rain
and tears et It's
five o'clock :
non pas un mais deux slows universels. La preuve est là, en HD, 45
ans après :
Oui,
mais n'était-ce pas déjà de
la variété ?
Aussi
vrai que Shocking Blue était un groupe néerlandais, Aphrodite's
Child était un groupe grec pour les jeunes d'Auxerre, de Vesoul et
d'ailleurs. Ce n'était pas Demis Roussos en djellaba scintillante
chez Michel Drucker avec un orchestre derrière. Ils appartenaient au
genre « pop » et sans que ce soit savant, on faisait la
différence avec la variété. C'était moins une question de musique
que d'appartenance (contre) culturelle. A l'époque, l'opposition
était dure. Tout s'est estompé.
Qu'est
ce que ça veut dire ? Ca veut dire qu'il y a des artistes comme
Demis Roussos, Abba, Mike Brant, Jo Dassin, Jean Ferrat, Johnny
Hallyday et quelques autres comme, au hasard, Mozart et les Beatles,
qui quittent leur genre (classique, engagé, variété, pop-rock...)
pour accéder, une fois ou deux, à quelque chose de supérieur que
chacun peut ressentir en dehors de son clan : soudain on
pardonne à ses ennemis, on trouve du charme aux filles moches, on se
rapproche des grands singes, on se sent allègre et dispendieux,
invincible, on aime son enfance, son prof de maths, les étrangers et
l'hiver.
Attention :
tous les grands singes sont en danger d'extinction.
Demis Roussos est mort le 26 janvier, au moment où une certaine gauche radicale prenait le pouvoir en Grèce. Quel est le rapport ? Son radicalisme n'a pas dépassé 666, l'album conceptuel d'Aphrodite's Child d'après l'Apocalypse de St Jean (!), sorti en 72, où on entend plus sa basse que sa voix surpuissante aux aigus si gracieusement fêlés. Ensuite, il a débordé le psychédélisme, sa fourrure et sa voix pour faire une carrière de poids dans la variété internationale. A part les poils, on se demandait si c'était le même homme que sur la pochette d'It's five o'clock.Car il faut se souvenir qu'Aphrodite's Child a incarné le rêve hippie, entre 68 et 70. Pas dans les journaux spécialisés : dans les booms, le living des parents, les noms gravés au compas sur les tables, les embrassades sur le chemin du collège. Avec presque pas de guitares, un orgue, une basse et cette voix. Un vaisseau vertical... Les jeunes de 2015 savent-ils ce qu'est un slow ? Le genre qui fait fondre toute timidité. Se lever tremblant d'amour pour on ne sait qui à la première note. Ce genre d'ascension... Une certaine idée de son prochain et de son lointain.
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